11 x 16 cm
Plume et encre brune, lavis brun et rehauts de gouache blanche
Issu d’une famille d’artiste, Horace Vernet est familiarisé très tôt avec les diverses techniques de l’art : dessin, gravure et peinture. Il est le petit-fils du fameux Claude-Joseph Vernet (1714-1789), peintre de marines par excellence et le fils de Antoine-Charles-Horace, dit Carle Vernet (1758-1836), qui s’illustre dans la peinture militaire. C’est auprès de ce dernier qu’il reçoit son enseignement technique et développe un attrait particulier pour la représentation d’équidés. Dans l’atelier paternel, Horace Vernet fait la rencontre fructueuse de Théodore Géricault, le maître romantique avec qui le jeune homme se lie d’amitié. Horace Vernet réalisera par ailleurs un portrait de Géricault en 1824, année de sa mort prématurée.
Quelques années plus tard, Vernet rejoint l’atelier de François-André Vincent et achève sa formation en remportant le prix de Rome en 1810. Très apprécié du clan Bonaparte, il sera choisi pour peindre plusieurs portraits de Napoléon avant son éviction, tout en se rapprochant de Jérôme, roi de Westphalie qui lui commande également un portrait équestre.
Horace Vernet demeure fidèle à l’Empire, même après sa chute. Durant les premières années de la Restauration, son atelier prolifique est fréquenté par un grand nombre d’artistes et autres personnages illustres hostile au règne de Louis XVIII. Paradoxalement, Vernet trouve un soutien précieux auprès de Louis-Philippe, lui permettant d’exposer dans son atelier certaines de ses œuvres considérées comme antiroyalistes et rejetées du Salon. Cependant, le talent incontestable de l’artiste lui permet de s’illustrer aux Salons de 1826 et 1827 et d’être nommé directeur de l’Académie de France à Rome en 1829, fonction qu’il occupe jusqu’à sa mort en 1835.
La carrière de peintre militaire implique l’étude rigoureuse de la cavalerie à travers l’observation de l’anatomie des chevaux. Tout comme son aîné Géricault, Vernet témoigne d’une brillante facilité dans leur exécution. Notre dessin atteste de l’influence du séjour italien de l’artiste. Le sujet est familier, il est traité par Géricault en 1817 (ill. 1) : il s’agit de l’une des nombreuses esquisses qui devait servir à l’exécution d’une œuvre mesurant une dizaine de mètres de largeur qui ne sera finalement jamais réalisée.
L’œuvre représente le départ pour une course de chevaux libres à Rome, également appelée la course des chevaux barbes ou Barberi. Tout comme son aîné, Vernet représente quelques chevaux, tout juste sortis de leur enclos qui se débattent violemment pour tenter de fuir les quelques mains des palefreniers qui peinent à les retenir. L’œuvre exprime la fougue et l’extrême excitation de ces deux chevaux cabrés. Pour se faire, Vernet esquisse les formes, dans un cadrage serré et un format restreint, par de rapides coups de plume traduisant une tension omniprésente.
L’énergie et la force animale presque oppressante est traduite d’une part par l’utilisation du lavis brun qui accentue les ombres, et d’autre part par l’utilisation ingénieuse de la gouache blanche qui met en exergue la musculature du cheval à droite comme élément dominant de la composition. Dans cette veine romantique inspirée par Géricault, Vernet illustre ainsi la domination de l’animal et plus largement de la nature sauvage sur l’homme et exacerbe cette puissance incontrôlable. On peut aisément penser que Vernet, tout comme Géricault, réalisa cette œuvre en Italie après avoir assisté à cette fête populaire appelée le Carnaval de Rome, durant lequel avaient lieu des parades dans les rues allant de la Place du Peuple à la Place de Venise et des courses de chevaux sur le fameux Corso.
Par cette esquisse, Vernet prouve son indéniable don dans la représentation équestre. L’œuvre est saisie d’une verve et d’une fougue propre au courant romantique permettant d’évoquer la sensibilité émotionnelle du peintre.
Cette esquisse servit probablement de première pensée à la réalisation de l’huile sur toile par l’artiste aujourd’hui conservée à New York, au Metropolitan Museum (ill. 2), datée de 1820 qui inspira probablement le père de l’artiste qui réalise une toile représentant le même sujet, d’un format plus ambitieux. Le cadrage plus large permet de rendre compte de la grande foule présente dans les gradins en arrière-plan, attendant impatiemment que le spectacle commence (ill. 3).
M.O
Provenance :
• Paris, Galerie de Bayser
• France, collection particulière