Fusain, lavis et rehaut d’aquarelle.
Monogrammé AR et annoté Etude en bas à gauche.
Armand Rassenfosse est un artiste précoce. Dès l’âge de quinze ans il s’essaie au dessin, et entreprend ses premières gravures en autodidacte. Un ami de la famille, Adrien de Witte, se prend d’affection pour le jeune garçon et lui offre un apprentissage de qualité. En 1886 Rassenfosse frappe à la porte de l’atelier de Félicien Rops ; c’est le début d’une grande amitié nourrie de riches échanges épistolaires. Il faudra attendre 1920 pour que l’influence de ce second maître s’estompe et laisse place à la ligne et au geste propre à Rassenfosse. En parallèle il mène de front une carrière officielle brillante : en 1925 il est membre de l’Académie Royale de Belgique, il en devient titulaire en 1930 et même directeur de la classe des Beaux Arts en 1934.
Graveur émérite il se lancera dans de nombreuses recherches, donnant même son nom à un vernis. Il reste encore aujourd’hui célèbre pour son illustration de l’édition des Fleurs du mal de 1899 pour laquelle il use de toutes les ressources de la gravure (notamment de l’encre au sucre qu’il vient de mettre au point).
Mais Rassenfosse fut aussi un dessinateur de talent. Poussé par son perfectionnisme il se découragera à plusieurs reprises face à l’étendu du travail qui lui reste à fournir. Ainsi il dira « En sortant de chaque séance, je vois que je sais toujours moins et que malheureusement je n’aurai jamais le temps, étant donné les conditions dans lesquelles je me trouve, je n’aurais jamais le temps, de pouvoir étudier comme je le voudrais ». Pour autant ses œuvres dessinées restent admirables et d’une grande finesse. Il sera surtout le peintre de la femme de condition modeste et il trouvera dans le sujet de la toilette le moyen d’étudier avec passion la structure et le modelé du corps humain.
L’œuvre présentée ici est représentative de ce sens aigu de l’observation. Une jeune femme présentée de dos se sèche après son bain. Nous voyons ici comment Rassenfosse sait tirer d’un sujet somme toute banal une scène d’une grande émotion. Rien ne vient troubler l’extrême simplicité de l’ensemble (même la chaise est recouverte d’un drap de bain) servie par une économie de moyen éblouissante. Rien ne vient non plus contraindre le regard qui est libre de serpenter à la faveur des courbes sensuelles de la nudité de la jeune femme que rien ne dissimule.
L’œuvre entière témoigne de l’admiration de Rassenfosse pour le corps féminin. Lui-même, à la vue d’un modèle, s’exprimera ainsi « Nous avons pour le moment un joli modèle – joli est le mot. Une jeune fille de dix huit ans – très bien faite mais un peu grassouillette. Si on avait le temps ! Elle convient à merveille pour faire des aquarelles du XVIIIème siècle ». On parlera de ses nus en disant qu’ils « respirent la santé et n’obéissent qu’au simple prestige de la forme et de la couleur naturelle » (Louis Lebeer).
L’artiste resta fidèle à sa ville tout au long de sa vie, ce qui lui valu une grande popularité et une admiration chaleureuse de ses concitoyens, mais aussi la plus vive estime des milieux intellectuels.
BIBLIOGRAPHIE :
Nadine de RASSENFOSSE, « Rassenfosse, peintre-graveur-dessinateur-affichiste »,1989, Belgique
Exposition « Gravures et dessins d’Armand Rassenfosse », Bibliothèque royale de Belgique, 1936
Exposition « De Ingres à Paul Delvaux », Musées royaux des beaux-arts de Belgique, 1973