33.5 x 39.5 cm
1846.
Aquarelle sur papier.
Signée et datée A. Zötl pinx. am 11. November 1846. en bas à droite, titrée et légendée en partie inférieure.
Bibliographie :
• Cortázar, Julio (1914-1984), Aloys Zötl (1803-1887), Parma Milano : Franco Maria Ricci, 1976.
• Mariotti, Giovanni (1936-), Le bestiaire d’Aloys Zötl, 1831-1887, Paris Milan : Chêne : F.M. Ricci, 1979.
Zötl a retrouvé cette parfaite concordance organique de l’animal et de son habitat. 1
André Breton
Bien que peu mentionné par les ouvrages d’histoire naturelle, l’œuvre d’Aloys Zötl célèbre pourtant avec magnificence la nature. Ce maître teinturier d’origine autrichienne est notamment connu pour ses aquarelles colorées d’animaux en tout genre. L’ensemble de 170 feuilles provenant directement de son atelier fut dispersé à Paris sous le marteau de maître Maurice Rheims en 1955 et 1956.
Au XIXe siècle, siècle du progrès industriel, la modernité se célèbre aussi à travers les recherches menées sur la faune et la flore. De ces recherches naissent les museum d’histoire naturelle qui recensent progressivement les découvertes et témoignages matériels issus des voyages à travers le monde afin d’alimenter la connaissance générale.
Bien qu’Aloys Zötl n’ait jamais voyagé au-delà des frontières autrichiennes, ses aquarelles sont un formidable témoignage des connaissances ethnologiques au XIXe siècle. En effet, sans jamais quitter le petit bourg d’Eferding du nord de l’Autriche, cet artisan passionné d’ethnographie et d’histoire naturelle se constitue progressivement un catalogue raisonné d’animaux présentés dans leur habitat, inspiré de ses connaissances personnelles, de ses lectures ainsi que des témoignages de voyageurs du monde. Mêlant l’art et la science, son fabuleux bestiaire est l’illustration d’une époque en plein essor industriel et une source très prisée de connaissances. Plus ou moins naïfs, loin d’être scientifiquement exacts, la plupart de ces dessins ont été imaginés d’après des récits et images fantasmées. Aloys Zötl travaillait pour son plaisir personnel sans aucune contrainte iconographique extérieure. Ne cherchant aucun public et ne se séparant d’aucun de ses travaux, il pouvait ainsi librement travailler à son rythme et accorder un soin particulier aux rendus des détails.
« Je suppose qu’il travailla toute sa vie dans la même pièce, car il ne changea jamais le format de son papier à dessin et jamais n’eût envie de peindre autre chose que des bêtes luxueuses au milieu de riches décors naturels. »2
Des œuvres minutieusement signées et datées auxquelles Zötl ajoutait toujours quelques lignes sur ses découvertes, généralement « la grandeur, les mœurs et les pays d’origine des êtres reproduits. » 3
Son travail est rigoureux et organisé : les oiseaux n’apparaissent vraisemblablement qu’à partir de 1837, après les mammifères, poissons, mollusques et reptiles. Notre aquarelle, datée de 1846 présente « l’un des plus singuliers et des plus curieux que la nature ait produits » 4 : le Rhyncops nigra « l’écumeur noir » ou encore le « bec-en-ciseaux noir ». Originaire des Etats-Unis, reconnaissable à son bec si particulier, il « se rencontre en toute saison sur les bords sablonneux et marécageux de(s) Etats les plus méridionaux. »5 La description la plus détaillée de son mode de vie se trouve dans l’œuvre de l’ornithologue Jean-Jacques Audubon (1785-1821).
Au-delà de l’utilisation historique et scientifique, l’œuvre d’Aloys Zötl fut célébrée par les artistes surréalistes un siècle plus tard dont André Breton (1896-1966), chef de
file du mouvement, qui remit à l’honneur son travail :
« (…) Zötl était entré en possession d’un prisme mental fonctionnant comme instrument de voyance et lui dévoilant en chaîne jusqu’à ses plus lointains spécimens le règne animal dont on sait quel énigme il entretient en chacun de nous et le rôle primordial qu’il joue dans le symbolisme subconscient. ».
M.O.
1Extrait de la préface d’André Breton (Tinchebray, 1896 – Paris, 1966) dans le catalogue de vente de l’Hôtel Drouot du jeudi 3 mai 1956.
2
Note d’introduction du catalogue de vente du 19 décembre 1955.
3 Note d’introduction du catalogue de vente du jeudi 3 mai 1956.
4 Eugène Bazin, Scènes de la nature dans les États-Unis et le Nord de l’Amérique, Sauton, 1868, Tome 2, p. 451 - Traduction d’une partie de l’œuvre de Jean-Jacques Audubon, The birds of America, from drawings made in the United States and their territories, New York : G.R. Lockwood, [1871], c1839.
5Op. cit. p.451