48,5 x 72,5 cm
1900.
Pastel sur toile.
Signé en bas à droite et daté en bas à gauche.
Au dos, sur le châssis, étiquettes portant les inscriptions : « n°162, Carnegie Institute, Pittsburgh, PA, USA, artiste IWILL M. J., professeur, Lansyer, 11 Quai Voltaire, Paris » ; « NAVEZ, emballages de tableaux, 76, rue Blanche, Paris, Exposition..., n° 30, M. IWILL, pastel ».
Provenance
• France, collection particulière
Expositions
1900, Paris, Exposition Internationale Universelle, groupe II, œuvres d’art, classes 7 à 10, no 1031.
1911 ou 1912, Pittsburgh, Carnegie Institute, no 162.
Le nom d’Iwill apparut pour la première fois au Salon des artistes français en 1895 ; le jeune peintre y exposait un Effet de neige à Suresnes un jour d’hiver. Léon Clavel aurait choisi ce pseudonyme tiré de l’anglais « I will » pour signifier sa détermination d’embrasser une carrière artistique, un choix qu’il effectua contre le gré de son père, secrétaire général à l’Assemblée Nationale. Iwill avait été retenu prisonnier en Suisse pendant la guerre de 1870, et avait effectué plusieurs missions pour l’État, notamment au Maroc en 1872, avant d’abandonner ses fonctions pour se former auprès du peintre autrichien Kuwasseg, et du vendéen Lansyer. C’est la nature qui l’attirait, et c’est au paysage qu’il s’adonna toute sa vie, voyageant inlassablement. Venise et la Normandie furent ses sujets de prédilections, mais Iwill sillonna également le Pas-de-Calais et les Flandres, les alentours de Paris ou encore la Bretagne.
« Pastelliste ou peintre, Iwill aime le miroir des eaux, le grain qui vient, le vent mouillé des mois d’hiver […]. Ses tons de pastel en ont retenu la nacre changeante, le gris-perle des fonds à la lueur verdâtre ou rosée », écrivait Raymond Bouyer . L’artiste excellait autant à l’huile qu’au pastel, en peintre de l’atmosphère dont le sens de l’observation le garda de s’enfermer dans un système. Iwill affectionnait particulièrement les effets de brume ensevelissant sous un voile épais le soleil ou la lune. Demeurant à Paris au 11 quai Voltaire, c’est tout naturellement en contrebas de chez lui, sur le Pont du Carrousel, qu’il a posé son chevalet ce 28 janvier 1900. Nous sommes à l’aube de l’Exposition Universelle, où l’on retrouve probablement notre pastel sous le titre Paris, la nuit (no 1031). Sur une toile préparée avec une base bleu clair, l’artiste enveloppe le paysage d’un voile nocturne gris chaud qui mêle dans une même tonalité le ciel, l’eau et l’architecture. Une généreuse pleine lune à demi dévoilée se reflète dans le fleuve, en touches de jaune franc auxquelles répond la lumière des lampadaires qui ponctuent les quais et la passerelle des arts. Au milieu du fleuve, dans un contraste plus dense, l’artiste a placé une péniche. D’autres embarcations sont amarrées le long des quais ; on devine rive gauche le port de Saint-Nicolas que surplombe le Louvre, quand se dressent rive droite le dôme de l’Institut et la silhouette de Notre Dame.
On retrouve ce traitement atmosphérique du paysage et cet effet de brume légère dans plusieurs œuvres d’Iwill, comme Nuit grise, vaste paysage aux tonalités bleue et grise, éclairé par la lune, ou encore la Vue de Venise, (1899, huile sur toile, 13,5 x 28 cm, collection particulière), dans laquelle embarcations et monuments se découpent en silhouette sur une lagune brumeuse. La maîtrise du pastel d’Iwill pour traduire les effets de lumière est également manifeste dans son paysage de La Hague (pastel sur papier, 1895, 57,5 x 89,5 cm, collection particulière).
Le peintre exposa à plusieurs reprises aux États-Unis. On le trouvait en 1910 au Detroit Museum of Art, qui lui consacrait une exposition personnelle. Le Carnegie Institute conserve dans ses archives des lettres de l’artiste datées de 1911 et 1912, et c’est probablement à cette époque qu’il y exposa notre pastel, comme le rappelle une étiquette au verso du châssis, bien qu’il ne figure pas dans les catalogues de l’Exposition annuelle de l’Institut.
M.B.
Bibliographie générale (œuvre inédite)
Une ville pour l’impressionnisme – Monet, Pissarro et Gauguin à Rouen, cat. exp., Musée des Beaux-arts de Rouen, 2010.
Tableaux, pastels, et aquarelles par M. J. Iwill et provenant de son atelier, vente après-décès de l’artiste, 6 février et 22 novembre 1924.