Émile René MENARD (Paris, 1862 - 1930)

Effet d’orage, côte de Provence

39,5 x 77 cm

Huile sur carton monté sur châssis. Signé en bas à droite. Au revers, deux étiquettes anciennes à l’encre brune, la première avec le nom de l’artiste et la seconde, d’exposition, avec le titre et numéro F.10.

Provenance
• France, collection particulière.

Œuvre en rapport
Émile René Ménard, Effet d’orage, côte de Provence, signé et daté de 1928, huile sur toile, 105 x 201 cm, Paris, musée d’Orsay, inv. RF1977-256.

L’art d’Émile René Ménard fut façonné par une solide culture antique héritée de son père, historien d’art et éditeur de La Gazette des Beaux-arts, et de son oncle, écrivain et philosophe fameux qui inspira le mouvement parnassien. Ménard étudia auprès du décorateur Galand, puis de Paul Baudry et d’Adolphe Bouguereau à l’École des Beaux-Arts, et enfin à l’Académie Julian. Si ses premiers tableaux furent empreints de références directes à la Bible ou à l’Antiquité, le peintre évolua progressivement vers la représentation d’un univers atemporel nourri par ses voyages en Sicile, Grèce, Palestine ou Italie, où les thèmes pastoraux lyriques évoquent un âge antique idéal.

Au cœur d’une époque effervescente où se côtoyaient les courants artistiques les plus divers, Ménard travailla dans une veine personnelle, empreinte de l’héritage classique mais aussi d’une modernité qui le rapproche des symbolistes. Membre de la Sécession Munichoise, le peintre participa en 1897 à la Libre Esthétique de Bruxelles, puis rejoignit la « Bande Noire », mouvement protéiforme qui entendait répondre par une sobriété naturaliste héritée de Courbet au foisonnement coloré et lumineux de l’impressionnisme. Ménard ne dédaigna pourtant pas la couleur, et découvrit avec bonheur le pastel aux côtés d’Albert Besnard.

« Il a poussé plus loin que quiconque l’étude des heures crépusculaires », écrivit Lucien Simon lors de la rétrospective de l’œuvre de Ménard organisée l’année de sa mort à la galerie Charpentier. C’est à la tombée du jour que le peintre situe notre tableau, qui s’inscrit à la fois dans la lignée des paysages historiques de Poussin, et dans la veine monumentale de Puvis de Chavannes.

Notre œuvre est l’esquisse parfaitement aboutie préparatoire à une grande toile conservée au musée d’Orsay, à moins que le tableau en soit une version postérieure et agrandie. Au centre du tableau, un jeune pâtre joue de la flûte au milieu de ses moutons. Le paysage méridional vallonné, planté de chênes verts, descend jusqu’à la mer ; des montagnes échelonnées ceignent l’horizon. L’atmosphère mystérieuse de la fin du jour marie l’ombre d’un orage naissant aux éclats roses, oranges et mordorés du ciel. La scène est vivement brossée, d’une touche qui évoque plus qu’elle ne dessine, jouant sur les contrastes de couleurs complémentaires pour créer le relief et la profondeur.

Le peintre a maintes fois eu recours à cet effet d’orage, comme dans La Charrette (pastel, 46 x 61 cm, Vente Briest, Drouot Richelieu, 13 juin 1990, n° 197), ou encore dans le diptyque de La vie pastorale (huile sur toile, 352 x 285 cm, Musée d’Orsay), commande publique pour la Faculté de Droit de Paris. La figure du pâtre saisie dans la poésie du crépuscule, comme la gamme chromatique employée, rapprochent également notre œuvre du Pâtre au crépuscule du Musée des Beaux-arts de Brest (pastel sur papier marouflé sur toile, 52,7 x 67 cm).

Bibliographie
Le mystère et l’éclat. Pastels du Musée d’Orsay, catalogue d’exposition, Paris, RMN, 2008.
Autour des Symbolistes et des Nabis du Musée : les peintres du rêve en Bretagne, catalogue d’exposition, Musée des Beaux-Arts des Brest, 2006.
Jean-David JUMEAU-LAFOND, Les peintres de l’âme, le Symbolisme idéaliste en France, catalogue d’exposition, Bruxelles, Musée d’Ixelles, 1999, p. 100‑104.
Catherine GUILLOT, « La quête de l’Antiquité dans l’œuvre d’Émile René Ménard », Bulletin de la Société d’Histoire de l’Art français, 1999, p. 331 sq.
André MICHEL, Peintures et pastels de Pierre Ménard, Paris, Armand Colin, 1923.

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