Jean-Aristide RUDEL (Montpellier 1884 – id. 1959)

« Vague latine à Palavas »

Huile sur panneau d’isorel. Signé en bas à droite J-A. Rudel. Circa 1920

Jours heureux à Palavas-les-Flots, durant l’entre-deux-guerres. Telle est la thématique que Jean-Aristide Rudel illustre excellemment dans ses paysages de plage : corps féminins émancipés de fraîche date, tonalités rares et contrastes d’un fauvisme assagi, paradoxe des contre-jours révélateurs de luminosité…
De ce répertoire, on retiendra ici cette marine, sertie dans son encadrement typique « Art déco ». Une pochade devant le motif, une étude d’atelier, un fragment promu en œuvre ? Qu’importe. Retenons-en avant tout la forme-couleur singulière qui transpose en des glacis translucides la vision du peintre, son regard captif de la fluidité aquatique s’affalant sur le sable, son attention suspendue à la nervosité contraire du ressac. Rien que la mer, dont la réalité fantasmée se peuple peu à peu de naïades dansantes, dont les cortèges zoomorphes chevauchent, indéfiniment, la vague.

C.F., directeur de 20/21.siècles (Cahiers du centre Pierre Francastel)

Le tableau, habité en relief par un amas de petits grains de sable enkystés dans la couche picturale séchée sur le motif, s’étire au gré d’une mer paisiblement languedocienne. La vague s’épuise, s’enroule autour d’une écume bouillonnante et blanche. Sable ocre foncé, accompagné de transparences imperceptibles de mauve teinté de lilas, phénomènes chromatiques relevant d’un ressac délicatement coloré, eau verte et turquoise exhaussée d’un bleu plus aigu au sommet du rouleau : harmonie de couleurs tant de fois convoquées par Rudel pour célébrer les plaisirs de la mer et des baigneuses du bel été héraultais. Désir de recueillir l’énergie de ces bruissements maritimes et de ces figures féminines afin de célébrer la vie, quand le fracas des armes de la guerre s’éloigne. À Palavas, vers 1920, sous son parasol, un artiste, un homme se reconstruisait, célébrant mois après mois un nécessaire hymne à la vie, à ses petits bonheurs évanescents et aux beautés simples et légères de l’existence.

Danielle BERTRAND-FABRE, historienne
(remerciements à monsieur David RUDEL pour sa collaboration)

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