Jean-Antoine Constantin, dit CONSTANTIN D’AIX (Marseille 1756 – Aix-en-Provence 1844)

« Vue d’une villa à Rome animée de personnages »

Huile sur toile

Peintre, aquarelliste et graveur de talent, Jean-Antoine Constantin est considéré aujourd’hui comme l’un des pères de la peinture provençale. Dans son sillon, marqué par son amour du paysage où la nature est source d’harmonie, on trouve de nombreux artistes comme Auguste de Forbin, Louis-Mathurin Clérian, Émile Loubon, ou François-Marius Granet. Ce dernier clamera d’ailleurs, avec peut-être une mesure toute marseillaise, son admiration pour Constantin d’Aix : « Celui-là sera toujours le maître. Nous ne sommes pas dignes de délier les cordons de ses souliers. » ! Il apparait donc comme le maître de cette école provençale du paysage. Né au quartier de la Loubière, dans la ville de la Bonne Mère, il est remarqué, encore enfant, par un peintre sur émail qui le fait entrer dans une fabrique de porcelaine, dans le quartier de St-Jean-du-Désert. Mais le jeune garçon n’y reste pas longtemps et part à l’Académie de Peinture et de Sculpture suivre les cours de David de Marseille, Jean- Joseph Kapeller et Jean-Baptiste Giry. Attestant déjà d’un savoir-faire et d’une certaine facilité, il attire bientôt l’attention d’un amateur d’art qui, séduit par la qualité de ses dessins, demande à le faire venir avec lui à Aix-enProvence.
Après ses études, le jeune Constantin s’établit dans une fabrique de faïences de Clérissy. Mais suivi par la bonne fortune, il quitte bientôt cette région car des mécènes fortunés et intéressés par son art lui offrent, comme il était la coutume pour de jeunes artistes en devenir, un séjour à Rome.
Là, dans la quiétude de la Ville Eternelle et la beauté des alentours, s’ouvre un nouveau chapitre dans la vie du peintre.
Il complète son éducation artistique aux côtés de Joseph Vien. Parcourant la campagne, il s’émerveille des charmes de cette terre d’accueil « cette magnifique Italie où la nature et les monuments apportent partout le caractère du Beau ». Il décrira d’ailleurs plus tard ces années de bohème comme les plus heureuses de sa vie, les plus proches du bonheur dans leur simplicité créative : « Je n’avais que vingt sous à dépenser par jour. Je me levais avec le soleil, et prenant mon carton, je courais dans les champs pour dessiner, heureux et ravi de me voir dans une si belle nature. »
Cette parenthèse italienne se ferme au bout de trois ans, quand une fièvre le contraint de rentrer en France. De retour d’Italie, il regagne Aix-en-Provence, réalisant là une quantité impressionnante de paysages aixois et plus généralement provençaux, souvent exécutés sur le motif. Bien après cette époque, en 1860, Adolphe Meyer écrit à son sujet dans le Plutarque Marseillais : « Bien des gens m’ont dit qu’ils avaient l’habitude de rencontrer un homme petit, assez pauvrement vêtu, d’une physionomie douce et calme, Traversant curieusement les champs et allant, selon son caprice, s’asseoir à quelque ombre pour dessiner l’un des nombreux sites aux environs d’Aix. Tout le monde connaissait ce bonhomme qui, souvent, demeurait la journée devant le même point de vue, dînant d’un morceau de pain et de quelques radis, allant boire au premier ruisseau clair qu’il entendait jaser. »
À Aix, de 1786 à 1792, Jean-Antoine Constantin prend également la tête de l’école fondée par le duc de Villars. Mais bientôt la Révolution et la Terreur qui embrasent la France vont venir troubler la quiétude de l’artiste, qui perd alors son emploi et doit abandonner l’école. Les temps sont difficiles pour le peintre.

Ce n’est qu’en 1807 qu’il revient à Aix-en-Provence et reprend l’enseignement du dessin. Il retrouvera ses anciens élèves, dont le comte de Forbin, devenu directeur des Musées Royaux, ainsi que Granet qui lui apportèrent leur soutien et leur appui financier. En 1813, il accepte le modeste poste de professeur adjoint à l’école de dessin d’Aix, au titre de professeur de paysage.

En 1817, il reçoit une médaille d’or à l’Exposition de Paris, et jusqu’en 1827, envoie régulièrement des toiles au Musée du Louvre, où elles ne passent pas inaperçues.

Il est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur en 1833. Sa carrière est bientôt ralentie par une santé défaillante et c’est dans la pauvreté qu’il meurt, en 1844, à l’âge avancé de 88 ans. Jean-Antoine Constantin repose aujourd’hui au cimetière de Saint Pierre d’Aix-en-Provence.

L’œuvre de Constantin d’Aix ressemble à une longue promenade, bucolique et pittoresque au sens premier du terme, au sein d’une nature variée, dans la quiétude et la lumière des campagnes aixoises et romaines.
En ce sens, notre tableau est assez emblématique du goût du peintre. La toile n’est pas datée mais provient sans doute de la période romaine, si exaltante pour l’artiste. On y retrouve une lumière diffuse et pourtant chaude, une végétation luxuriante, de vieilles architectures aux pierres brunes et, ci et là, quelques groupes de personnages pour ajouter spontanéité et vérité à cet instantané fixé sur la toile. Ici, cette architecture imposante, entourée d’arbustes et bordée d’un fleuve surmonté d’un pont, ferait volontiers penser à la Villa Médicis. On aperçoit au loin un clocher qui pourrait bien être celui d’une des nombreuses églises de Rome. Sans certitude sur la topographie du lieu, on se laissera pourtant volontiers séduire par la finesse accordée aux détails de la scène. Dans l’exécution des groupes de personnages par exemple : le couple de personnages au premier plan éveille toutes les curiosités, s’agit-il d’un octroi ? Le personnage assis tendant la main est-il en train de recueillir le prix d’un passage ? Et plus haut, sur le pont, on se demande ce qui se trame entre les deux personnages chapeautés.

La scène, séduisante en bien des points, l’est d’abord parce qu’elle raconte une histoire et qu’elle nous emmène rêver dans des paysages de Méditerranée.

On trouve des œuvres de Constantin d’Aix au musée Granet d’Aix-en-Provence bien entendu, ainsi qu’au musée Calvet d’Avignon et au musée Cantini de Marseille. Sont également conservées au Cabinet des Dessins du Louvre quatre études que le roi Charles X lui acheta en 1826.

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