Terre cuite reposant sur un piédouche en bois noirci.
Signée au verso sur le montant
Formé dans l’entourage de ciseleurs et d’orfèvres, Albert-Ernest Carrier de Belleuse dit Carrier-Belleuse a été l’élève de la « Petite École », future École des Arts Décoratifs, où il se lia d’amitié avec Charles Garnier. Il fut également l’élève de David d’Angers à l’école des Beaux‑Arts de Paris, où il entra en 1840.
Séjournant en Angleterre, il a travaillé pour la manufacture de céramique de Minton, où il se distingua par la création de statuettes de personnages historiques souvent éditées dans différentes matières. Il débuta au Salon en 1851, mais sa renommée commença réellement en 1861, avec son groupe « Salve Regina ». À partir de 1857, ses oeuvres exposées sont remarquées pour leur sensualité : « la Bacchante » de 1863 (jardin des Tuileries) ;
pour leur naturel plein de réalisme : « Hébé endormie » de 1869 (musée d’Orsay) ; ou pour leurs qualités d’expression avec les bustes de Renan, Delacroix, Thiers.
En 1867, avec « Le Messie », il obtint la médaille d’honneur du Salon. Il reçut d’importantes commandes de monuments publics (pour la Roumanie, l’Argentine...) et participa aux décors sculptés des grands travaux parisiens de Napoléon III : le Louvre, le Tribunal de Commerce, la Banque de France et l’Opéra de Paris dont les torchères animent encore le bas de l’escalier.
Peintre accompli, il tomba sous le charme de la côte d’Opale, entre Berck et le cap Gris-Nez, notamment à Audresselles dont il s’est beaucoup inspiré pour réaliser d’élégants paysages mais aussi des portraits. Il était alors de bon ton pour les grandes familles pas-de-calaisiennes de se faire portraiturer par l’artiste.
Attaché à la Manufacture de Sèvres comme directeur des travaux d’art de 1875 à 1887, il sût y insuffler une certaine modernisation du style. Avec Pierre Puvis de Chavannes et Bracquemont, il sera l’un des instigateurs de la scission avec le « Salon » en 1890 de la Société Nationale des Beaux-Arts, qui devint ainsi le second « Salon ».
Carrier-Belleuse fut l’un des artistes les plus prolifiques du Second Empire et son buste trône aujourd’hui dans l’entrée du Musée d’Orsay.
De notre sculpture féminine se dégage une sensualité sans égal, portée par le traitement libre de la matière comme le permet la terre cuite.
D’une beauté générique, typique de l’oeuvre de Carrier-Belleuse, l’inconnue offre un visage radieux, dévoilant sa poitrine comme un emblème, esquissant à peine un sourire. Vêtue d’un costume oriental, évoquant les précieux motifs géométriques des vêtements traditionnels ottomans, elle porte sur son abondante chevelure le fameux « fez » égyptien à pompon.
Sa technique à la fois hardie et délicate, et le sentiment exquis qui se dégage de ses créations ont parfois fait comparer notre artiste à Clodion. À juste titre d’ailleurs, car tous deux mêlent dans leurs sujets sensualité rubénienne et un peu du libertinage français de la fin du XVIIIe siècle. Carrier-Belleuse se démarque en distillant comme ici, avec tact et talent, son goût pour l’exotisme.
Blibliographie :
• « A.E Carrier-Belleuse sculpteur », Galerie Michel Bertran, 2002.